16 septembre 2008




Le Pilon

 

 

En signant son premier roman, Paul Desalmand entraîne son lecteur dans un conte qui lui fait découvrir le monde des livres et son arrière boutique au fil de l'autobiographie picaresque d'un livre singulier qui se raconte à la première personne. Un livre «hors norme» à dévorer, au plus vite, «dans le bon sens du terme».


Par Jérôme Skalski


Le «pilon», le mot fait froid dans le dos ou plutôt frissonner la quatrième de couverture de tout livre qui se respecte. La chose aussi : «machine à détruire les livres» «aussi haute qu'un immeuble de cinq étages».

 

Machine à détruire les livres aussi haute qu'un immeuble de cinq étages

 

Le livre qui prend la parole, par la grâce de l'écriture, dans Le Pilon de Paul Desalmand, n'échappe tout d'abord pas à la règle. Il l'avoue dès le deuxième chapitre : «J'ai peur». Mais cette terreur née de la rumeur des livres -«Il se dit qu'il n'est pire pour un livre que le pilon» -, terreur insidieuse née de de la perçante conviction de la destruction prochaine est bientôt surmontée pour devenir l'occasion d'une exaltation forcenée de la vie. Evoquant Dostoïevski, le livre donne la clef de la conversion de valeur de cette certitude : le « jour où il a échappé à la mort fut le plus heureux de sa vie». Par la bouche de Dimitri Karamazov, c'est évidemment lui, le livre, qui parle : «Je vaincrais toutes les souffrances, si seulement je puis dire et me redire à chaque instant : je suis ! Dans mille douleurs : je suis ! Crispé par la torture : je suis ! ... Je suis lié au poteau...mais je vis, je vois le soleil, et si je ne le vois pas, je sais qu'il existe !»

 

Tout est vrai !

 

Car c'est de sa vie que le livre de Paul Desalmand nous entretient au fil de ses pages où tour à tour il se fait joyeux, tendre, naïf, raisonneur, sarcastique, précis, exalté, lyrique ou doucement mélancolique : toujours vrai : «All is true [tout est vrai] , comme dirait ce pédant de Balzac. Mon existence a été mouvementée. Il n'empêche, si les pages qui suivent ont une quelconque valeur, elles ne le doivent qu'à leur véracité

 

Un livre qui dit «je»

 

Vrai, on se prend aisément au jeu de cette parole faite écriture qui commence par un aveu, une coquetterie et une cachotterie : «J'ai plus de vingt ans, ce qui n'est plus la première jeunesse pour un livre qui a beaucoup baroudé, mais je suis assez bien conservé (...) Trois choses seulement dont je ne parlerai pas afin de préserver un peu de mystère : mon auteur, mon titre et le nom de l'éditeur». On se prend au jeu, certes, de ce livre qui dit «je», mais sans être gratuit : il s'engage et se risque : «A côté des innombrables forces qui tendent à faire de l'humanité une fourmillière, il en existe de sens contraire qui empêchent la mort de l'intelligence et de l'imprévisible. Le livre est de leur côté.» Voilà un livre qui sait faire la part des choses et qui se met, résolument, du côté des livres et des hommes «pour enrayer le fantastique pilon de la société marchande qui clochardise la planète, anéantissant les cultures au nom du pèze, du fric et du meilleur prix» !

Un livre du côté des livres

 

Le Pilon de Paul Desalmand se présente comme un ensemble de petits récits, d'évocations, de reflexions et de portraits, chacun étant précédé d'une citation épigraphique, qui sont autant de petits essais, pamplets, contes et poèmes en prose mêlés et semés au cours de la pérégrination picaresque d'un livre vraiment étonnant : les entrepots où les livres, à peine nés, sont guettés par la rongeuse critique des souris, l'horrible caisse au fond d'une librairie indigne, une librairie de rêve où l'on parle «bellement de livres», un «reliseur» à la jambe de bois, un voyage en Iran, un clochard conteur «sous les ponts de Paris», la bibliothèque de Nevers, les parlottes sans fin, entre livres, la nuit, sur les étagères, l'odeur de l'ambre solaire et le sable plein les pages...

On se surprend à se découvrir ami d'un livre. Un livre par lequel les autres livres aussi deviennent, plus encore, amis et familliers : un livre que nos mains, pour le voir sans cesse reprendre ses aventures, serrent et retiennent comme une main quand il se met à dériver au fil de l'eau.

 


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«Ce serait l'histoire d'un livre qui raconte sa vie...»

 

«Le Pilon doit son origine à Jacques Auzoux, responsable de la Bibliothèque nationale, raconte Paul Desalmand. Il me dit un jour : «J'ai longtemps pensé à écrire un roman. Ce serait l'histoire d'un livre qui raconte sa vie depuis la sortie de l'imprimerie. Mais je ne suis pas écrivain. J'en ai parlé à un normalien qui n'a pas suivi.» Je me suis mis à écrire le soir même

 

 

 

Paul Désalmand, Le Pilon, Quidam Editeur, 2006.15 euros.

Dans toutes les bonnes librairies - http://www.quidamediteur.com

 

« Je suis né dans le peuple»


Paul Desalmand est né le 24 août 1937 à 6 h du matin. Il est originaire d'Arenthon, un village de Haute-Savoie. A propos de ses origines, il lui arrive de dire, paraphrasant Tchekhov : « Je suis né dans le peuple. On ne me fera pas le coup des vertus populaires.» Enseignant, puis écrivant, il a publié entre 50 et 60 ouvrages en différents genres (parascolaire, vulgarisation, contes pour enfants, essai, histoire, etc.) dont : Stendhal, Sartre et la morale (Ecritoire Du Publieur), Un pari sur la gloire, Écrire est un miracle (tous deux aux éditions Bérénice), Picasso par Picasso (Ramsay), L'athéisme expliqué aux croyants (Le Navire En Pleine Ville ) et Sartre s'est-il toujours trompé ? (La Passe Du Vent).

 


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Les éditions Bérénice à la conférence organisée par le Secours Populaire Français du Pas-de-Calais


Jean Michel Platier et Francis Vladimir

 

 

 


Paul Desalmand


Le 30 avril dernier, à l'occasion du 7ème salon du livre d'expression populaire et de critique sociale, Paul Desalmand, Jean-Michel Plattier et Francis Vladimir étaient les invités d'une conférence débat organisée à Arras au siège de la fédération du Pas-de-Calais du Secours Populaire Français. A cette occasion qui a rassemblé une trentaine de personnes autour des conférenciers, avant une lecture faite de quelques pages de L'annonce faite à Venise et de Moi, Pierre Rivière par le dramaturge, romancier et poète Francis Vladimir, l'auteur du Pilon a présenté son livre sur Sartre et Stendhal. Jean-Michel Plattier, éditeur et auteur de l'essai Vladimir Maïakovski, un idéal poétique a évoqué, entre autres, les enjeux attachés à la vie des petites maisons d'édition et notamment des éditions Bérénice. Leurs ouvrages ainsi que celui de Thierry Bernard, Citoyen Robespierre, sont publiés aux

 


 

Editions Bérénice

11 Rue de La Glacière

75013 Paris

Tel: 01 47 07 28 27

 


 

 

 

par Liberté 62 publié dans : Idées
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