20 octobre 2008 1 20 /10 /2008 08:28



COMMUNAUPOLE DE LENS-LIÉVIN (CALL)


SORTIR LA FISCALITÉ DE LA CONFIDENTIALITÉ


Les élus communistes quittent la séance pour dire leur opposition au huis clos imposé par le groupe socialiste pour la présentation des grandes lignes fiscales. Ils font part de leurs préoccupations concernant tant les finances communautaires que celles des habitants de l'agglomération.


Par Jean-Michel Humez




LA CALL tenait une séance plénière soir. Après une série de délibérations adoptées sans problème, Michel Vancaille, président, faisait savoir, fort du soutien du groupe socialiste, qu'il sollicitait le huis clos sur la question de la fiscalité notamment sur la présentation des chiffres. Il proposa que le débat public reprenne ensuite devant la presse et le public. Cette demande a amené Bruno Troni, président du groupe communiste, à déclarer l'opposition de son groupe considérant que le huis clos était à l'opposé de toute transparence.

Une appréciation réfutée par Guy Delcourt, président du groupe socialiste qui considère que “la vérité des chiffres ne peut être perçue de la même façon par tout le monde”. En clair, on ne comprend pas la même chose si on est un technicien, un élu, un habitant ou encore un journaliste. Une conception de la démocratie qui a laissé pantois ceux qui ont du quitter la salle. En cette saison où nous parviennent les avis d'imposition locale (taxe d'habitation, foncier bâti, foncier non bâti, et la taxe professionnelle pour les entreprises), chaque contribuable commence par regarder la somme exigible et les pourcentages de hausse sur les années précédentes.

Ceux-ci sont souvent en hausse, plus ou moins fortes, parfois modestes mais réelles. Et déjà la question : “qu'en sera-t-il demain ?” Évidemment, pour certains “demain est un autre jour”. En fait, en matière de fiscalité locale, c'est à l'automne de l'année précédente que se décident, pour l'essentiel, les hausses de l'année suivante. Et soir, il aurait été intéressant de connaître les grands axes de la politique fiscale pour la CALL. Cette politique doit sortir de la confidentialité dans laquelle on l'enferme. Les finances locales sont certes un peu plus compliquées à comprendre que le budget d'un ménage mais ce sont des choses trop sérieuses pour être du seul ressort d'experts, soient-ils les plus compétents.


Des élus communistes indignés


Il aura donc fallu discuter avec le groupe communiste qui avait quitté la séance, de sa propre volonté, en désaprobation avec le huis clos imposé par le groupe socialiste. Une discussion qui permit de comprendre un peu mieux le déroulement de cette séance surprenante. Bruno Troni fit savoir que les responsables de chaque groupe politique, s'étaient vus invités de la semaine dernière, quelques jours avant cette séance, pour se voir expliquer les difficultés financières.

On nous a informé qu'il manquait 10 millions d'euros et qu'il était donc envisagé de mettre en place une taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TOM) et une taxe additionnelle qui augmenterait la taxe d'habitation et du foncier bâti. À partir de là, il aurait fallu débattre sans documents chiffrés. On est devant le fait accompli”, devait déplorer Bruno Troni.

Si les élus communistes reconnaissent, comme les élus socialistes, que les finances locales sont en péril notamment du fait de la politique gouvernementale, ils se refusent à faire payer toujours plus les familles. L'un des éléments qui méritent réflexion est que le potentiel fiscal s'avère l'un des plus faibles sur le territoire de la CALL et que les limites seront vite trouvées. Les dégâts se sont aggravés dans certaines communes de la CALL qui ressemble de plus en plus à un gruyère ; le fromage tient mais il est plein de trous. Des élus communistes confrontés au même constat dans leurs propres communes et qui dénoncent le projet de réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU) attribuée à certaines communes abritant une population fragilisée. Certaines communes se verraient priver de ce nécessaire budget alors que l'État s'était engagé en 2005 à augmenter progressivement la DSU durant cinq ans.

Des élus communistes qui doivent faire des choix dans leurs villes respectives et reporter des projets à d'autres échéances sous peine de pressurer encore plus le contribuable modeste. Ils se déclarent prêts à participer à une véritable réunion de travail avec tous les groupes politiques de la CALL en espérant que la réflexion dépassera la simple vision comptable pour amener la réflexion sur l'enjeu essentiel qui devrait être le recul des inégalités sur l'ensemble des différents territoires. Cette séance plénière de la CALL est révélatrice des mesures gravissimes qui touchent les collectivités territoriales : plafonnement de la taxe professionnelle, bouclier fiscal, stagnation des dotations, transferts de charges sans les ressources compensatoires pérennes et évolutives. Si les élus communistes de la CALL ont réussi pendant six ans à enrayer la hausse de l'impôt il n'en reste pas moins vrai que désormais il s'agit de passer à une autre étape en appelant les habitants des 36 communes de la CALL à prendre réellement la mesure de cette spirale infernale et à changer la donne. Le combat n'est d'ailleurs pas limité à tel ou tel territoire, le mécontentement étant généralisé à l'hexagone.

En ces temps où les gouvernants du monde jettent par dizaines de milliards d'euros l'argent public dans le trou noir de la crise bancaire, il est bon de rappeler les propositions des élus communistes au niveau national. Ceux-ci affirment qu'il est grand temps de stopper cette politique néfaste en donnant du souffle aux finances locales. Pour les élus communistes, l'économie d'aujourd'hui, particulièrement dominé par la sphère économique et financière, doit enfin être mise à contribution. Des masses de capitaux, gigantesques “actifs financiers” produits du travail, échappent à la fiscalité. Ils sont détournés de la satisfaction des besoins des populations, de l'investissement utile et vont remplir les poches des gros actionnaires. En taxant les actifs financiers à un taux modeste de 0,5% quelques trente milliards d'euros seraient disponibles et redistribués par une péréquation solidaire. Quel souffle pour les finances locales, les populations, les services publics locaux, l'investissement public et donc la croissance économique et l'emploi.



INTERVENTION DE BRUNO TRONI AU NOM DU GROUPE COMMUNISTE


NOUS sommes conscients du sérieux de la situation financière de notre Communauté. Le bref exposé qui nous en a été fait lors du dernier Bureau ne fait que confirmer les craintes dont nous avions fait part à plusieurs reprises ces derniers temps. (…) Le manque de concertation sur des sujets aussi graves ne peut quʼentraver la recherche de solutions diverses et la sérénité qui doit présider au travail qui est le nôtre. Depuis de longues années nous faisons partie de lʼexécutif, ce qui sous entend que nous ne sommes pas seulement là pour voter –ou non- les délibérations qui nous sont soumises. (…) La coopération doit prendre toute sa dimension dʼautant plus lorsqu ʼil sʼagit de sujets aussi sérieux. (…) Nʼest-il pas normal que la population ait connaissance de ce qui se joue aujourdʼhui dans cette Communauté, qui est aussi la leur ? Nʼest-ce pas dʼautant plus normal quʼil sʼagit dʼenvisager la mise en place de fiscalité et autres taxes qui les toucheront à brève échéance ? (…) Maintes fois nous avons appelé à la prudence, à ne pas “charger la barque”, à se concentrer dʼabord sur la réalisation de nos compétences premières avant de nous engager dans dʼautres projets, paraissant certes intéressants mais qui nous demanderaient ensuite de gros efforts financiers que nous ne pourrions fournir. (…) Il nous manque aujourdʼhui 10 millions dʼeuros et lʼEtat porte sans aucun doute une responsabilité écrasante, entre les réformes de la TP, la décentralisation non compensée et, bien avant cela les transferts de charges récurrents, la stagnation de la DGF… (…) Dʼautres projets de réformes gouvernementaux sont à lʼétude et lʼavenir ne chantera pas demain pour les collectivités. (…) Lʼavenir ne chantera pas non plus pour tous ces gens qui voient leur pouvoir dʼachat se dégrader de jour en jour et ce, depuis des années. La crise financière qui sévit aujourd ʼhui, ne touche pas que les gros actionnaires (…). La Bourse nʼest pas déconnectée de lʼéconomie réelle. La récession entraîne, entre autres, des conséquences catastrophiques sur des pans entiers dʼactivité, aggravera le chômage et la précarité, et je ne parle même pas des ressources liées à la taxe professionnelle. Dans nombre de caddies, les conserves ont remplacé massivement les légumes et la viande entraînant des carences. Un nombre croissant de personnes doit renoncer à se soigner et à soigner leurs enfants. (…) A quoi dʼautre, demain, ces gens devront-ils renoncer si cette assemblée décide dʼajouter des taxes aux taxes ? (…)

Il faut sʼinterroger : nos habitants doivent-ils sans cesse sʼadapter aux décisions communautaires, décisions prises sans eux, qui ont un coût et risquent dʼaboutir à une fiscalité supplémentaire ? La faiblesse des capacités contributives de nos habitants ne doit-elle pas être lʼune des données essentielles à prendre en compte avant de se jeter dans un projet quel quʼil soit ? Nous sommes persuadés que si. Nous ne sommes pas contre lʼimpôt sʼil est juste ni même contre son augmentation si celle-ci est mesurée et véritablement indispensable. Mai est-ce le cas ici ? Faut-il remettre en cause ou réduire certains services, revoir notre participation à certains grands projets ? Peut-on opérer des économies sur certains postes budgétaires ? Il nous faut réfléchir à tout cela rapidement et regarder cela de très près car, je le répète, notre groupe nʼacceptera pas une fiscalité ou taxe supplémentaire. Ces questions se posent dʼailleurs avec dʼautant plus dʼacuité que nous parlons dʼun budget à dépenses constantes or, ces dépenses augmenteront encore à lʼavenir. (...) Je pense -ce sont des exemples mais il y en a dʼautres-, à notre participation à hauteur de 5 % au fonctionnement du Louvre –qui sʼest dʼailleurs transformée en 10 %-, à celle de 15 % au syndicat mixte pour le stade couvert. (…) Il est très clair que nous allons devoir revisiter sérieusement certaines de nos politiques. Parallèlement à cette réflexion, un combat nous attend également. Celui quʼil nous faut mener, ensemble, sans concession, contre ce gouvernement. Pourquoi ne pas imaginer dʼautres actions, des façons de faire originales en mobilisant et y associant notre population, concernée au premier chef par la multiplication des décisions nationales iniques.

Nous avons été élus par ces gens, non pour ajouter encore au désarroi provoqué par un Etat qui nʼassume plus son rôle (…) mais pour défendre leurs intérêts. Cela passe par (...) une gestion responsable mais aussi par la lutte dans tous les lieux où cela nous est possible. 22 régions dirigées par la gauche, des parlementaires, des élus locaux, une proximité avec nos administrés… (…) Comment pourrait-on ne pas se révolter face à ces gouvernants qui ne peuvent donner quelques millions (...) pour honorer leurs engagements en matière dʼenvironnement, pour pérenniser notre système de sécurité sociale, pour promouvoir une école de qualité… mais qui mettent sur la table (…) plus dʼun milliard dʼeuros pour sauver du naufrage des banques qui ont fait preuve de leur mauvaise gestion.

Pour sauver ce système capitaliste à bout de souffle dans lequel des dizaines millions de gens périssent pour permettre à quelques centaines de dʼenrichir dans des proportions que le commun des mortels a du mal à imaginer. Avant dʼen terminer, nous revendiquons la mise en place dʼun comité de pilotage politique en vue de lʼélaboration du budget. Nous sommes décidément à la croisée des chemins. Il nous faut nous engager résolument pour la transformation de cette société vouée au seul pouvoir de lʼargent en une société solidaire et juste. Reste quʼil nous faut aujourdʼhui opérer les bons choix en gardant à lʼesprit quʼil nous faudra demain, chacun en ce qui nous concerne, assumer ces derniers. ”

Par Liberté 62 - Publié dans : Politique
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